Banque de terres : un terreau fertile pour pallier le vieillissement des agriculteurs

 Banque de terres de la MRC de L'Érable

Les nouveaux maraîchers n’ont pas de racines régionales

Le phénomène se confirme dans toutes les régions du Québec, même si cela se présente à différents degrés et sous diverses formes. Les agriculteurs vieillissent. Leur âge moyen est de 55 ans et ils font face à un manque criant de relève dans leur milieu.

En fait, la vraie relève n’a souvent pas de racines dans une entreprise agricole. C’est ce qu’a constaté Leslie Carbonneau lorsqu’elle a pris en charge le programme de banque de terres agricoles de la MRC de Brome-Missisquoi.

C
’est à la suite d’une consultation publique que ce projet a vu le jour. En 2011, la MRC mandate le Groupe de réflexion et d’action sur l’agriculture et le paysage pour élaborer un plan stratégique d’accès aux terres pour les agriculteurs en devenir. Le projet de banque de terres voit le jour en 2012 et connaît un grand succès.

L’année suivante, d’autres MRC emboîtent le pas à Brome-Missisquoi, d’abord celle d’Argenteuil, puis celles de Val-Saint-François, de Charlevoix, de l’Érable, de Memphrémagog et de Pontiac. Même la communauté métropolitaine de Montréal a manifesté de l’intérêt pour le projet.

« On s’est rendu compte qu’ils avaient autant de terres agricoles disponibles que nous », dit Leslie Carbonneau. Le programme permet d’offrir des terres en location, ou en location avec option d’achat.
 
Après être entrées en contact avec des agriculteurs souhaitant louer leurs terres dans leur municipalité, les MRC mettent en commun leurs efforts pour recruter des candidats agriculteurs dans les écoles ou différentes foires agricoles. « On a touché un point sensible, dit Noémie Asselin, agente pour la banque de terres de la MRC de l’Érable, dans le Centre-du-Québec. Il y avait de la demande et il y avait de l’offre. »
 
Étant donné que les candidats, en général, ne proviennent pas de familles d’agriculteurs, ils sont disposés à se déplacer pour faire leurs premières récoltes.  « On a des candidats de la Mauricie, de Montréal, de l’Estrie et du Bas-Saint-Laurent, dit-elle. Il y a beaucoup de relève non apparentée au milieu. Ils vont souvent dire, de toute
façon : “Peu importe où je vais déménager, je n’ai pas d’attache dans une région.” »

À ce jour, 26 propriétaires de la MRC de l’Érable ont mis leurs terres ou leurs bâtiments à louer par l’entremise de la banque et 19 candidats ont manifesté leur intérêt pour la région.
 
La MRC de l’Érable s’apprête à faire signer un premier jumelage qui permettra à une entreprise maraîchère bio de s’installer, en plus d’offrir de la formation en zoothérapie avec de petits et de grands animaux.
 
Comme ailleurs, cette MRC demande aux candidats d’avoir une expérience minimale ou de la formation, mais les exigences sont flexibles.

« Ce ne sont pas des critères coulés dans le béton. On peut avoir quelqu’un de 46 ans avec une 4e secondaire mais qui a dix ans d’expérience. L’idée, c’est d’avoir des candidats sérieux », dit-elle.


Contrairement à la MRC de Brome-Missisquoi, celle de l’Érable n’est pas une zone de villégiature. On a donc adapté le programme de banque de terres à leur région. « Il y a des propriétaires qui ont acheté de nouvelles terres mais qui ont des bâtiments dont ils n’ont pas besoin, par exemple », dit Noémie Asselin.
 
La MRC de Charlevoix a aussi mis en oeuvre le programme cette année et en était encore à sélectionner des terres qui pourraient être louées à de nouveaux agriculteurs. « On a beaucoup de terres en friche », confirme l’agente de projet Nancy Chabot.
 
Plus une terre est abandonnée longtemps sans être cultivée, plus il est difficile de la travailler.
 
Au cours du processus de jumelage, la MRC s’assure que le candidat est bien renseigné sur la viabilité et la légalité de son projet. Il faut éviter que quelqu’un signe un bail de six ans, par exemple, pour constater, après un an, que rien ne pousse.

Banque de terres de la MRC de L'Érable

 La diffusion du programme
À la MRC de Brome-Missisquoi, Leslie Carbonneau les renseigne également sur une formation offerte par le ministère québécois de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation.
 
En fait, le projet a pris une telle ampleur et acquis une telle popularité que cette MRC a transféré la diffusion du programme au Centre de référence en agriculture et agroalimentaire du Québec (CRAAQ).
 
Pendant ce temps, elle se réjouit de l’affluence de nouvelles entreprises dans la région, sans parler des 11 enfants de plus qui sont inscrits dans les écoles du coin.

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Source :
Le Devoir, Caroline Montpetit, 6 août 2016